Déclaration relative au vote sur les minarets, 15.12.2009
Déclaration de l'AFIS après le vote du 29 novembre sur les minarets
Communiqué
Comment parvenir à la tolérance
Depuis son existence, l’Association des Fonctionnaires Internationaux Suisses (AFIS) s’engage sans réserve pour la promotion - en Suisse et dans le monde - de la coopération internationale, pour le multilatéralisme et pour les principes inscrits dans la Charte des Nations Unies, parmi lesquels figurent en position éminente la protection des Droits de l’Homme ; ces principes sont inscrits dans les statuts de l'AFIS et nous les défendons.
Le résultat de la votation fédérale du 29 novembre 2009 sur l'interdiction des minarets interpelle très fortement le Comité de l’AFIS à plusieurs égards et particulièrement dans le cadre des principes et des objectifs exprimés ci-dessus, et le Comité croit nécessaire de faire entendre sa voix, suite à ce résultat.
Le vote, favorable à l’interdiction des minarets, a créé un profond malaise comme le montre les nombreuses réactions - individuelles et collectives - et nous devons avant tout essayer de le comprendre. Ce vote est en fait beaucoup plus complexe que la question de la construction de minarets. Il est le résultat d'une somme de facteurs, allant de la crainte individuelle, à l'inquiétude pour différents problèmes, au manque de connaissances, en bref, une sédimentation d'angoisses et de réactions d'une partie des habitants de la Suisse. Ce malaise dépasse les frontières de la Suisse et l'image de la Suisse s'en ressent.
Sur le plan juridique, la votation a créé un paradoxe entre d’une part, une interdiction relevant du droit constitutionnel et, d’autre part, la garantie des droits fondamentaux, notamment le principe d’égalité et la liberté de croyance, inscrits dans la même Constitution fédérale, et de plus, garantis par les conventions internationales des Droits de l’Homme auxquelles la Suisse est intimement liée. Il incombera aux autorités compétentes de résoudre ce paradoxe.
Il reste néanmoins que cette décision du 29 novembre 2009 constitue une décision du peuple suisse, adoptée en plein exercice de la démocratie directe, un fait qui ne peut pas être nié. Or, il s’agit de bien comprendre le système démocratique suisse, qui fonctionne en de multiples processus, sans rester statique. Des décisions comme celle prise le 29 novembre dernier n’ont heureusement pas de caractère immuable, mais évoluent et peuvent être revues avec le temps. L’histoire de la Suisse a déjà connu des exemples de votations ayant abouti à des résultats “regrettables”, qui ont été corrigés par des votations ultérieures (exemple: l’interdiction de l’activité des jésuites, ayant figuré dans la Constitution fédérale). La démocratie vivante est une oeuvre qui n’a de cesse. Il faut déployer des efforts en démocratie, dialoguer et accepter de se remettre en question.
La “nouveauté” que la votation du 29 novembre 2009 nous apprend est que les questions d’immigration et de coexistence des communautés religieuses ne constituent plus seulement des questions d’ordre interne ou de politique interne, comme cela a été ressenti plutôt par le passé, mais elles se posent et doivent être débattues et résolues aussi bien au plan interne qu’international. L’histoire de notre pays repose sur le consensus et le compromis, et non pas sur l’exclusion et la peur. Cette histoire suisse doit être le meilleur ferment des consensus d’aujourd’hui et de demain - une raison d’espérer et d’être confiant dans l’avenir en prônant la tolérance et la concorde dans la diversité.
Pour tous ces motifs, le Comité de l’AFIS, soucieux de la cohésion sociale, de la paix religieuse et de la sauvegarde des droits fondamentaux ainsi que de la poursuite de la coopération internationale, souhaite très vivement
- que les autorités fédérales, cantonales et communales et la société civile trouvent - avec force vive - la convergence allant vers un consensus national;
- que les communautés religieuses et les responsables de la société civile redoublent d’efforts en faveur du dialogue et de la compréhension réciproque, dans le cadre d'une éducation faisant appel à la tolérance;
- que tous les habitants de la Suisse s’ouvrent les uns aux autres, sans préjugé, et qu'ils découvrent les rencontres interculturelles au bénéfice de la paix sociale et religieuse;
- que tous ses membres se mobilisent pour la promotion des droits humains en Suisse.
Ce seront de réels efforts des habitants et des autorités de la Suisse, efforts nécessaires pour aller vers une société apaisée - l’AFIS y prendra sa part !
Adopté par le Comité de l’AFIS, à Genève,
le 15 décembre 2009